Bookmakers #22 - L'auteur du mois : Pierre Christin
Né en 1938 à Saint-Mandé (Val-de-Marne), Pierre Christin est l’un des scénaristes majeurs de la bande dessinée européenne. Souvenons-nous, en premier lieu, de sa saga spatio-temporelle au rayonnement international : « Valérian et Laureline », avec les dessins intersidéraux de Jean-Claude Mézières, dès la fin des années 60. Puis des premiers albums exceptionnels d’Enki Bilal, de « La Croisière des oubliés » à « Partie de chasse », en passant par son préféré : « Les Phalanges de l’Ordre noir », sur la réunion d’anciens membres des Brigades internationales pour un dernier baroud d’honneur contre des terroristes chrétiens.
Salué en 2019 du prix René-Goscinny pour l’ensemble de son œuvre, cet artisan du verbe et des situations, également journaliste et auteur de romans « très noirs, à charge contre une certaine classe politique française », qui fut une fois librettiste d’opéra, conserve une belle humilité vis-à-vis de sa fonction au royaume du 9e art : « Un super scénario offert à un dessinateur nul, ça donne une BD nulle ; un scénario faible dans les mains d’un grand dessinateur… ça donne une BD pas mal. »
Pierre Christin (2/3)
Pour les fans de BD comme pour les chercheurs de la cosmo-université des astéroïdes de Shimballill, les aventures de « Valérian et Laureline » ont marqué l’Histoire. En 22 tomes déployés sur 1200 pages publiées aux éditions Dargaud, il s’agit de la plus longue saga à être restée entre les mains de ses créateurs originaux, Pierre Christin (scénario) et Jean-Claude Mézières (dessins), de l’album zéro intitulé « Les mauvais rêves » (1967) jusqu’au dernier tome de la série officielle, « L’Ouvretemps » (2010). Quatre décennies de boulot doux-dingue, dont l’intrigue court sur quarante siècles, au cours desquels voyage son duo merveilleux d’agents temporels.
Classique de la science-fiction vendu à plus de trois millions d’exemplaires, exposé au Portugal ou au Québec, traduit en vingt langues de l’Islande à la Chine en passant par la Turquie, ce space opera monté sur ressorts, malicieux et pacifiste, auquel « Star Wars » a beaucoup piqué, réjouit toujours. Par l’abondance de ses « bestioles » et de ses couches narratives, par l’ampleur graphique impériale de ses mille planètes, par les couleurs d’Evelyne Tranlé, ou par la grâce intrépide de Laureline, héroïne en avance sur son temps, née d’un rêve forestier et des convictions féministes de Christin. Lequel constate : « Valérian n’est pas une bande dessinée facile à lire : il y a beaucoup de cases, de texte, des thèmes ambitieux, d’allusions... Et pas d’éternel combat du bien contre le mal, mâtiné de déchirements familiaux. »
Avec son cher copain Mézières (disparu en janvier dernier), ils auront pourtant su offrir un pays aux étoiles, en subjuguant trois générations d’astronautes en culottes courtes, parmi lesquels Manu Larcenet, Christophe Blain, Charles Berberian ou Luc Besson. Tandis que le scribe galactique vient d’apporter un ultime point final à cette supernova via l’album « Là où naissent les histoires » (2022, avec les dessins de Virginie Augustin), grimpons illico à bord des vaisseaux de Pierre.
Enregistrements : novembre-décembre 22 - Mise en ligne : janvier 2023 - Entretien, découpage : Richard Gaitet - Prise de son, montage : Sara Monimart, Baptiste Dupin - Réalisation, mixage : Charlie Marcelet - Musiques originales : Samuel Hirsch - Lectures : Emma Bouvier, Stella Defeyder, Arnaud Forest, Silvain Gire, Samuel Hirsch, Olivier Minot et le public du Palais de Tokyo - Illustration : Sylvain Cabot - Remerciements : Loo Hui Phang, Clarisse Le Gardien, Avril Tembouret et Kanari Films pour les propos de J.-C. Mézières tirés du documentaire « L’Histoire de la page 52 » - Production : ARTE Radio - Samuel Hirsch
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